La Critique : Hellblade – Senua’s Sacrifice

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Si on m’avait dit avant que je lance Hellblade que j’allais me prendre autant de violence psychologique et de traumas mentaux en 8h de jeu, j’aurais peut être réfléchi à deux fois avant de signer ! Surtout que je connaissais bien le studio Ninja Theory et j’avais beaucoup apprécié leurs précédents titres (Enslaved : Odyssey to the West, Heavenly Sword et même le mal aimé et vulgaire DMC : Devil May Cry !). J’avais un peu suivi le développement de Hellblade, comme tout bon journaliste JV, via les journaux vidéos qui chroniquaient les différentes méthodes de motion capture (dont le grand Andy Serkis a participé, avec son Imaginarium Studio) ou encore les développements additionnels greffés sur l’Unreal Engine 4 pour permettre la « full performance capture » en temps réel (voir vidéo plus bas). Bref, plein de joyeusetés techniques dont le grand public se désintéresse probablement, mais qui sont la clé principale de l’expérience Hellblade : Senua’s Sacrifice. Et j’ai pris une grosse claque !

Je m’explique : contrairement aux précédents titres du studio, Hellblade ne propose pas un gameplay très complexe ou profond. Le jeu est découpé en trois grand pans : les passages narratifs d’exploration, ou l’on découvre le scénario. Sans vous spoiler, Senua est une guerrière celtique, qui s’embarque dans une mission pour retrouver l’être aimé, sur les terres des Northmen pour infiltrer une version nordique de l’enfer, la terre des morts nommée Helheim. Le tout est magnifiquement mis en scène, les décors sont souvent époustouflants, mais malheureusement le design de ces derniers est parfois trop linéaire. On tombe de temps en temps sur un chemin dérobé donnant accès à un obélisque (qu’on peut activer pour avoir des informations supplémentaires sur l’histoire), mais pas beaucoup plus. Là ou les niveaux s’ouvrent un peu c’est au moment du deuxième pan de gameplay : les puzzles. Souvent assez simples et utilisant la logique, l’environnement, les sons, le jeu fait en sorte de les renouveler pour ne pas lasser le joueur, et le tout sans aucune interface à l’écran ! Un joli tour de force. Cela vous permet de profiter un peu plus longuement des magnifiques décors réalisés pour l’occasion. D’ailleurs le jeu est tellement sûr de lui, graphiquement parlant, qu’il est livré sur PC en bundle avec Nvidia Ansel, l’outil de captures d’écran du constructeur de cartes 3D. Permettant des effets photographiques en tout genre et dont les captures d’écran de ce test proviennent.

On arrive enfin au troisième grand pan de ce jeu et là tous les fans de Ninja Theory les attendent au tournant : les combats ! Bon… On ne va pas faire durer le suspens plus longtemps, c’est efficace, mais ce n’est pas du tout l’intérêt principal du jeu. On est loin d’un DMC ou les combos s’enchainent par dizaines, ou instinctivement on découvre comment jongler avec les ennemis… ici au niveau des contrôles on peut difficilement faire plus simple : un coup faible et rapide, un coup fort et lent, une esquive, et un coup de pieds au corps à corps. On peut effectivement enchainer certains de ces coups pour étourdir les ennemis, ce qui passe le jeu en mode « ralenti » et vous pouvez à ce moment vous déchainer sur les monstres, en matraquant votre attaque rapide. Les ennemis eux se retrouvent souvent dans des arènes spécifiques, ou vous serez obligé de tous les occire pour passer à la zone suivante. On est pas loin du « syndrome Asssassin’s Creed » à certains moments avec plusieurs mobs qui attendent sagement que celui qui s’acharne sur vous soit mort pour prendre sa place… Il y a quelques combats épiques, pour compenser, contre des boss ou une configuration originale d’ennemis.

Jusque là, vous pouvez penser que j’ai été relativement déçu par le titre. Ou au moins que je suis mitigé. Mais détrompez-vous. Depuis que je suis en paix avec le faible dosage de l’implication du joueur dans un jeu (en partie grâce au titre « What Remains of Edith Finch » qui est le meilleur walking simulator de tous les temps, grâce à ses séquences marquantes et sa narration. Et ce malgré un gameplay quasi inexistant, ou du moins peu impliquant) j’ai appris a apprécier d’autres critères : la mise en scène est purement impeccable. Le jeu d’acteur et les techniques de cinématographie mises en place sont dignes d’un film ciné. Les performances des acteurs sont époustouflantes. Et surtout au niveau de l’immersion, ce jeu a été le premier a générer autant de stress, d’anxiété et de panique en moi depuis… depuis un bout de temps ! Et le tout sans VR ! (Et pour un vieux routier de la VR comme moi, c’est d’autant plus étonnant)

Et ce n’est pas un simple hasard. En plus d’avoir fait des recherches poussées sur la mythologie nordique et la culture Celte, Ninja Theory est aussi allé demander un coup de main à plusieurs spécialistes scientifiques (dont le professeur Paul Fletcher, de l’institut des neurosciences de Cambridge) dans le domaine des troubles psychiatriques et les désordres mentaux, pour plus de réalisme dans les symptômes. Ces experts leur ont décrit la psychose, les crises d’angoisse, les hallucinations et même la schizophrénie, afin que les développeurs puissent les recréer à l’écran et au casque. Et lorsqu’on voit le visage hyper expressif de l’actrice choisie pour incarner l’héroïne Senua, Melina Juergens (qui était à la base Video Editor du studio, et qui devait juste assister pour régler la mo-cap et faire les premiers essais maquillage… au final elle décrocha le rôle principal !) on se rend compte que les technologies de motion capture – plus particulièrement pour les expressions des visages – peuvent servir à ça, aussi : dépeindre les émotions avec le plus de justesse possible. Comme ici avec la peur, l’angoisse ou la folie. On l’avait déjà expérimenté avec la technique avant-gardiste de la Team Bondi (fermée depuis) avec LA Noire et ses suspects, dont on pouvait détecter dans les expressions faciales le mensonge. Mais là c’est à un tout autre niveau de réalisation et de fidélité graphique !

En résumé, j’ai été subjugué par cette performance hallucinante et hallucinée, assistée de cette mise en scène de haut calibre. N’oublions pas le sound design qui agrémentait parfaitement l’ambiance voulue. (avoir constamment plus de 3 voix qui vous hurlent dessus dans votre tête.. c’est aussi usant nerveusement que si vous étiez à la place de Senua ! D’ailleurs le studio conseille de jouer au titre avec un casque en début de partie !). Enfin, on terminera avec cette fausse polémique qui a émergé sur le web il y a quelques jours, suite à la sortie du jeu, à propos de la « Perma Death » à laquelle font face les joueurs. Après une demi-heure d’introduction, et ses premiers combats, Senua apprend qu’à chaque fois qu’elle perd un combat, la pourriture prendra de plus en plus possession d’elle, et au bout d’un moment la consumera intégralement. (et vous, joueur, de devoir recommencer toute la partie… il n’y a pas de slots de sauvegarde). Depuis les développeurs ont expliqué qu’il était très difficile de l’activer, voir même impossible. Et qu’il s’agissait plus de mettre le joueur dans un état de stress et de doute identique à l’héroïne. Et en cela, pour moi, le pari est totalement gagné. Je n’ai pas été une seule fois contraint de recommencer, par contre pendant toute ma progression j’avais cette épée de Damoclès au dessus de la tête…

VERDICT : 8/10 TRÈS BON

Malgré le délai, Ninja Theory signe là un titre moderne, sans concession, avec une vision bien précise, et une exécution toute aussi ciselée ! On pourra regretter deux choses : la durée de vie, entre 6 et 8h environ (et par extension le manque de rejouabilité), et les combats qui « font le boulot », sans pour autant être exceptionnels ou rappeler les grands moments du studio dans cette catégorie. Par contre, Hellblade est un jeu qui vous prend aux tripes, vous mets dans des états incroyables (pour un jeu vidéo) et ne vous prend à aucun moment par la main. Le statut de « pseudo-indé » a donné au studio le courage d’aller au bout de leurs idées. Et vu le résultat visuel, auditif et narratif, au petit prix de 29,99€ ce serait un crime de ne pas l’essayer !

Et enfin au sujet de la version Française : on a droit à une VOSTFR de qualité, mais pas de doublage FR pour ceux qui sont rebutés par le fait de devoir lire ou qui ne sont pas anglophones.

Page Steam : http://store.steampowered.com/app/414340/Hellblade_Senuas_Sacrifice/
Page Playstation Store : https://www.playstation.com/fr-fr/games/hellblade-ps4/

Galerie de captures d’écrans 4K : http://www.pcmrace.com/2017/08/08/epic-shost-hellblade-senuas-sacrifice/
Chaine Youtube de Ninja Theory : https://www.youtube.com/channel/UCPe-Z0xVV3aFyCtU-3PE-Bw
Le nouveau Senua’s Studio : http://senuastudio.com/

Gameplay vidéo :

 

Découvrez la transformation de Melina en Senua :

 

 

Realtime Performance Capture :

 

 

 

Testé par JoPe (Tuyatrojouey)

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